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LE VAGABONDAGE
OUVRAGES DE M. GEORGES BERRY
DEPUTlî
Moralité du Divorce 1880
ia Peine de mort 1881
La Grève 1882
L!Anarchie et VAthéisme dans la question sociale. 1888
Les Petits Martyrs 1892
La Mendicité 1897
França is-B oers 1900
Une page d'Histoire 1905
Syndicats Patronaux et syndicats Ouvriers 1909
BIBLIOTHEQUE PARLEMENTAIRE
GEORGES BERRY DÉPUTÉ DK PARIS
et
JEAN BERRY
AVOCAT A LA COUR D'APPEL
LE VAGABONDAGE
ET LA MENDICITE
EN RUSSIE, EN ALLEMAGNE, EN HOLLANDE EN BELGIQUE, DANS LES ÉTATS SCANDINAVES
ET DANS LE CANTON DE BERNE
DEUXIEME EDITION
, gjgLlOTECA
SIS's ' - '
-V- PARIS
EUGÈNE FIGUIÈRE & G», ÉDITEURS
7, RUE CORNEILLE, VP
Berlin : N. 9, Potsdamerstr. i34* Londres : 17-18, Green Street-Leicester Square
Bruxelles, : -72, .rué'Van Artevelde
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Il a été tiré de cet ouvrage :
Dix exemplaires sur papier de Hollande, numérotés de I à 10.
Deux exemplaires sur papier des Manufactures impé
riales du Japon, numérotés ii et 12.
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays.
LE
VAGABONDAGE
INTRODUCTION
Au milieu de la foule des apaches, des voleurs,
des déclassés de tout ordre et de toute catégo
rie, il se trouve des malheureux, qui attirent plus particulièrement notre pitié.
Ils ne se sontrendus coupables d'aucune faute; on ne peut leur reprocher aucun fait précis, positif; ils n'ont pas agi contre la société. Ils n'ont pas cherché à lui nuire, et cependant la
société les arrête et les mène devant ses tribu
naux, parce qu'ils ont contre eux la réunion de
ces trois circonstances : ils n'ont pas de domi cile certain, ils n'ont pas de travail, ils n'ont pas
de ressources. C'en est assez pour les faire
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sidérer comme dangereux, comme manifestant
dés tendances nettement antisociales; et cela les conduit à la prison, dont ils deviennent
bientôt, par la force des choses, les hôtes
assidus.
Combien en voyons-nous de ces lamentables miséreux ? et c'est toujours la moine histoire : les uns, alors qu'ils travaillaient, alors qu'ils étaient embauchés quelque part, sont tombés
malades : plusieurs mois d'hôpital ont été néces
saires pour les remettre à peu près d'aplomb ;
ils sont sortis de là, abattus, déprimés, sans cou
rage ; les patrons,qui n'ajment généralement pas
à s'embarrasser de convalescents, les oat
écon-duits de tous les ateliers, et comme ils sont à la rue, il ne reste plus qu'à leur appliquer la loi ;
qu'à les condamner
Les autres sont des individus qui, autrefois, se
sont laissés égarer, qui ont suivi de mauvais conseils, commis un délit quelconque et la jus
tice leur a infligé la peine méritée ; ils ont accom
pli cette peine, ils ont payé leur dette intégrale
ment, et ont conçu l'espoir de se relever : ils
veulent revenir au travail, être d'honnêtes gens ;
souvent, trop souvent, leurs antécédents
judi-
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claires leur ferment toutes les portes ; ils. n'ont plus d'argent, ils ne savent où coucher, c'est la
correctionnelle qui les attend.
D'autres, enfin, et ce sont les plus nombreux,
sont de véritables malades de la volonté dans
cette grande lutte pour la vie si âpre, si impi toyable ; ce sont les faibles qui sont tombés ;ils n'ont x^as eu l'énergie nécessaire, ils n'ont pas su vouloir, et le travail leur a semblé chose
au-dessus de leurs forces ; ils se sont laissés
aller. Pour ceux-là, c'est toute une éducation
à refaire, il faudrait les habituer peu à peu à
une tâche quotidienne, essayer de les relever à leurs propres yeux, les diriger, les mettre dans la bonne voie, leur donner le dégoût de
leur paresse et de leur oisiveté, tâcher de les
rendre des citoyens utiles à leur jiays et à eux-mêmes. Au lieu de cela, on les punit d'être des dégénérés, des ratés. On les envoie à la Santé pour quelques jours, mesure très efficace à la vérité, et dont le résultat certain est de les
décourager complètement ; ils se sentent traités
en criminels, la société voit en eux des ennemis :
à la sortie, ils se retournent nettement contre
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-détrousseurs de bourses, pensant cette fois que,
si on les condamne, la condamnation sera au
moins motivée par quelque chose.
Nous avons tous senti combien cette répres
sion du vagabondage ainsi organisée est inhu
maine, combien la loi est cruelle, injuste, et
combien ses conséquences sont déplorables, à
tous les points de vue. Il est pénible de cons
tater que dans notre pays, qui est celui de toutes
les idées nobles et généreuses, où l'on se préoc
cupe sans cesse d'améliorer le sort des faibles et de ceux qui souffrent, on ne nous ait pas encore
donné, à cet égard, quelque chose qui soit plus
en rapport avec les aspirations de notre temps.
C'est pourquoi, en présence de notre législa
tion trop vieille et tout à fait impropre à enrayer
cette plaie du vagabondage et de la mendicité
dont nous souffrons chaque jour davantage, j'ai
pensé qu'il y avait intérêt à mettre sous les
yeux du public, que cette question intéresse au
premier chef, ce qui a été tenté et obtenu par
les autres nations amies ou adversaires dans
cet ordre d'idées.
Pas une des nations, grandes ou petites, n'est
restée indifférente à ce flot montant de la
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dicité professionnelle qui est une véritable
honte pour un pays bien organisé, au point de
vue social.
Et je ne comprends pas l'apathie de nos diri
geants, alors que nous avons la prétention de
marcher à la tète de la civilisation.
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Depuis la Russie, ce vaste Etat,que nous consi
dérons trop souvent comme une nation encore
sauvage, jusqu'à cette minuscule Suisse, notre
voisine,la question de la mendicité a préoccupé,
en même temps que les Gzars, les présidents de
la République Helvétique : et je dois ajouter qu'en Hollande et en Relgique, pendant plu
sieurs années, la lutte contre cette plaie a été
entreprise, aussi bien par les souverains que par
les assemblées parlementaires ; et, grâce à la
volonté bien arrêtée des pouvoirs réunis, d'arri
ver à la disparition de ces miséreux, qui encom
braient les rues et importunaient les passants,on
verra, par le récit qui va suivre, à quel résultat
heureux on est arrivé dans certaines contrées
et cela parce que les autorités étaient déci dées à n'interrompre leurs efforts, qu'autant
qu'elles auraient enfin réussi dans la tâche